La compétitivité belge sous pression
L’enquête ‘European Tax Survey’ révèle que l’incertitude généralisée en matière de fiscalité demeure une importante source de préoccupation : 60 % des répondants considèrent qu’il existe un important degré d’incertitude fiscale dans leur pays. En Belgique, ce pourcentage atteint même 76,5 %. Ce que veulent avant tout les directeurs fiscaux, c’est une législation fiscale stable. Le principal problème cité par de nombreux répondants concerne la complexité accrue de régimes fiscaux déjà réservés aux initiés, en raison du flux de nouvelles mesures. Outre la charge de travail que représentent le suivi des changements et l’éducation permanente des équipes, ce mode de légifération est la principale cause de l’incertitude fiscale. Il y aurait également lieu de réduire la fréquence des changements si l’on veut améliorer la compétitivité des pays.
Pour 76,5% le degré d’incertitude fiscale est très élevé en Belgique
Sur l’ensemble de l’Europe, 60% des répondants indiquent qu’il y a un haut niveau d’incertitude fiscale dans leur pays. Ce sentiment d’incertitude est le plus marqué en Italie, en Hongrie, au Portugal et en France. Les fréquents changements apportés à la législation sont considérés comme la principale cause de l’incertitude fiscale par trois quarts des répondants. La deuxième cause d’incertitude avancée couvre l’ambiguïté, les lacunes et les changements de cap au niveau de la doctrine ou des directives officielles de l’Administration fiscale. Piet Vandendriessche, Managing Partner Tax & Legal chez Deloitte Belgique, ajoute : « Il est inquiétant que les pays avec lesquels la Belgique est en concurrence réelle pour l’accueil des sièges sociaux des entreprises – en l’occurrence les Pays-Bas, le Luxembourg, la Suisse et l’Irlande – enregistrent tous de meilleurs scores en matière de certitude fiscale ».
Evolution rapide de la législation
La grande majorité des directeurs fiscaux (tant en Europe qu’en Belgique) est surtout stressée par les changements incessants de la législation fiscale au sens large. De toute évidence, ce problème est l’un des plus épineux en Europe. La revendication ne porte pas sur des taux plus bas ou des incitants fiscaux plus importants, mais sur une plus grande certitude, qui découle d’une plus grande simplicité.
Près de la moitié de tous les répondants (52% en Belgique) indique qu’une plus grande certitude concernant l’avenir du régime fiscal aurait des répercussions positives sur la compétitivité de leur pays. Vandendriessche déclare: « Lorsque l’on aborde la loi récente imposant une fairness tax, on constate pas mal d’inquiétude et une grande incertitude parmi nos clients, car il est très difficile de dire qui sera touché par cet impôt et quelles en seront les conséquences. Des mesures telles que le fairness tax font la Belgique moins attrayant. Nous ressentons que la Belgique devient moins intéressant comme pays où les entreprises veulent établir où maintenir leur siège social ».
87% des répondants belges contrôlés par l’administration fiscale
Au cours des trois dernières années, trois quarts des répondants européens a été contrôlé par un service d’une administration fiscale ; en Belgique, ce chiffre atteint même 87 %. Seules la Hongrie (100%), la France (95,65%) et la Russie (92,86%) ont un taux de contrôle supérieur. La Croatie est le pays où le taux de contrôle fiscal est le plus bas (39%).
Les administrations fiscales s’intéressent plus particulièrement à l’imposition des revenus des sociétés et aux taxes indirectes ; les complexités du régime fiscal international – notamment en ce qui concerne les prix de transfert – demeurent un défi aussi bien pour les administrations fiscales que pour les multinationales.
La Belgique peut-elle encore concurrencer les autres pays européens?
Les Pays-Bas et le Royaume-Uni sont considérés, parmi les grandes économies, comme les juridictions les plus favorables pour les entreprises d’un point de vue fiscal. Ces deux pays ont déployé des efforts considérables pour offrir des conditions attrayantes aux multinationales et cela semble porter ses fruits.
Pour les plus petites économies le Luxembourg et la Suisse arrivent en tête, suivis de la Belgique et de l’Irlande. La Belgique aussi enregistre un bon résultat d’un point de vue européen, mais elle perd du terrain par rapport au Luxembourg, à la Suisse et aux Pays-Bas.
Piet Vandendriessche : « Aujourd’hui, la Belgique dispose d’un avantage concurrentiel incontestable avec son régime attrayant de déduction des intérêts notionnels et le traitement qu’elle réserve aux holdings. En plus, notre régime en place fonctionne bien et contribue à la certitude fiscale. Et je commence vraiment à m’inquiéter quand j’entends des figures politiques évoquer une possible limitation où suppression de ces mesures et d’autres. Sans ces dernières, la Belgique pourrait bien ne plus être à même de se différencier des autres pays offrant des conditions favorables aux sièges sociaux des entreprises. Imposer un tarif nominal de 25% à tout le monde semble démocratique, mais dénie la réalité en Europe : celle d’une concurrence forte entre les Etats membres pour attirer des investissements. Evidemment les mesures fiscales spéciales jouent un rôle important dans cette lutte ».
La fiscalité sous les feux de la rampe dans les sociétés
Plus des deux tiers (67%) des répondants n’ont pas été invités par des parties prenantes externes à justifier leur stratégie fiscale et plus de la moitié (51%) n’ont pas reçu de telles demandes en interne. Pourtant, une majorité des répondants (58%) pense que, par rapport à l’an dernier, la stratégie fiscale des entreprises fait l’objet de discussions et d’analyses plus approfondies. Jusqu’à 75% des répondants belges est du même avis.