Poser des choix
« Il convient de garder la tête froide par rapport aux résultats trimestriels: chercher la création de valeur sur base de ce seul étalon ne peut qu’amener à prendre de mauvaises décisions. Nous nous devons d’avoir le courage de poser des choix que nous pensons créateurs de valeur sur le long terme. » Parfaitement sensé et raisonnable, le propos était de Xavier de Walque, l’ancien CFO du groupe Dexia, que nous avions rencontré en mai 2008 (Finance Management n°18, juin 2008). Il y a une éternité, bien sûr, à l’échelle des crises que nous traversons. Mais avec le recul, il traduit, à lui seul, l’incommensurable complexité de la tâche du CFO dans un monde où seules la volatilité et l’incertitude sont devenues… certaines.
A côté des innombrables questions que pose le dossier Dexia aujourd’hui, et pour prendre un peu de hauteur, celle-ci, un peu provocante: la grande entreprise peut-elle être « durable »? « On peut associer à la notion de durabilité la perspective de transmission, une gestion en bon père de famille, la capacité créative et innovante, une appartenance, la transmission de savoirs, un certain sacrifice de la part des dirigeants dès lors qu’il s’agit de préserver l’outil de travail en temps difficiles, nous répond Francis Karolewicz, consultant français et auteur du livre Ecomanagement (aux Editions De Boeck). Dans une telle optique, la grande entreprise, de par sa structure, n’est de facto pas durable. »
Il n’en demeure pas moins qu’on peut y déployer un management dans l’optique de soutenir la durabilité de l’entreprise, en étant bien conscient qu’elle peut évidemment disparaître dans l’environnement mondialisé qui est le nôtre. L’enjeu n’est d’ailleurs pas qu’une entreprise perdure à tout prix. Un lien entre le management et le développement durable est à trouver dans la notion du « vivant », note Francis Karolewicz qui identifie quatre macro compétences du vivant dans le domaine de l’entreprise, à chaque fois à décliner au niveau organisationnel, au niveau de l’équipe et au niveau individuel:
1. Le fait d’être relié en permanence à son environnement – ce qui se passe autour de soi, en contact avec les différents acteurs – et d’en comprendre les évolutions;
2. L’innovation en permanence: « En distinguant la capacité à s’adapter – qui sous-tend la notion de réactivité: s’adapter au système sans prendre en compte qui l’on est – et la capacité à s’ajuster – répondre aux évolutions par des solutions non pas uniquement tournées vers le système mais dans une adéquation entre vous et le système. »
3. Le partage: « Travailler seul dans son coin n’induit pas d’enrichissement collectif. »
4. La notion de réorganisation: « Il n’y a pas de changement sans réorganisation. »
« Plus il y a défaillance sur ces quatre macro compétences, plus on réduit sa durabilité, conclut-il. On peut en outre s’accorder sur le fait que les entreprises qui ne sont pas durables sont celles qui privilégient les performances financières aux performances économiques et sociales. La durabilité se construit sur de la performance économique et sociale pérenne générant la performance financière dont l’entreprise a besoin pour se développer. »