Guberna inaugure son centre de recherche dédié aux actionnaires

Hnia Ben Salah

L’asbl Guberna, aussi connue comme l’Institut des Administrateurs, complète son portfolio d’expertise en inaugurant un nouveau centre entièrement consacré à la gouvernance actionnariale, un thème peu abordé jusqu’à présent. Deux chercheurs se dédieront ainsi à temps plein à l’information et la recherche liées au rôle des actionnaires dans l’entreprise et notamment à celui de surveillance du conseil d’administration. Pour se faire, Guberna s’est entourée de trois partenaires de choix : KBC Securities, Deloitte/Laga et Ageas.

Depuis ses débuts, l’équipe de Guberna s’est fixée pour mission de développer des principes de gouvernance pour tous types d’organisations et structures d’actionnariat. Illustrant une approche segmentée, elle coordonne plusieurs centres de gouvernance spécialisés: pour sociétés cotées, entreprises en croissance et entreprises publiques.
« Ces vingt dernières années, beaucoup d’attention a été portée aux codes de gouvernance et aux bonnes pratiques, contextualise Lutgart Van den Berghe, Executive Director de Guberna. Les travaux ont surtout été menés sur le conseil d’administration et l’administrateur individuel. Après de nombreuses recherches macro-économiques et de monitoring, nous nous sommes rendus compte que toute recommandation de gouvernance devait être adaptée au type d’actionnariat. Avec un marché de plus en plus complexe, celui-ci se révèle déterminant pour l’efficacité du conseil et le positionnement des administrateurs. Dans notre modèle capitaliste, ce sont les actionnaires qui décident de tout, que ce soit l’augmentation du capital ou des comptes ».
C’est dans ce contexte qu’est né le Centre Shareholder Governance. Celui-ci militera pour défendre une vision de long terme de l’actionnariat ainsi que pour davantage de synergies à un niveau européen.

Contre le court-termisme

Depuis la crise financière, l’attention protée au rôle joué par les actionnaires a pris de l’ampleur de toute part, y compris au niveau européen, même si pour Lutgart Van den Berghe, ils sont nombreux à ne pas jouer leur rôle de contre-pouvoir et de contrôle du conseil d’administration. « Ceux qui ont le pouvoir ne l’utilisent pas toujours. Les actionnaires n’exercent pas toujours leur tâche d’analyse », constate-t-elle.
Que ce soit le Rapport Kay, le Rapport Cox ou le rapport de l’American Aspen Institute, différentes études et recherches académiques encouragent la promotion d’un actionnariat stable et de long terme, à l’inverse d’un actionnariat dispersé. « Il apparaît, en outre, qu’un alignement entre les actionnaires, les administrateurs et le top management de l’entreprise est de la plus grande importance pour parvenir à une gouvernance de qualité », ajoute Lutgart Van den Berghe.
Si le développement et l’approbation de la stratégie doivent rester l’apanage du conseil d’administration, un rapprochement entre ces acteurs aux intérêts souvent divergents doperait l’organisation.

Équilibre délicat

A l’inverse de ses voisins, la Belgique est connue pour la grande stabilité de ses actionnaires et faible nombre de transactions réalisées. Les questions à creuser par les chercheurs de Guberna ne manquent pas : long terme versus court terme, la volatilité des marchés, les de-listings et non-listings en bourse, le renforcement du capital à risque, la récompense des actionnaires stables… L’équilibre doit être trouvé entre liquidités et stabilité.
« Chaque modèle a ses avantages et ses inconvénients, et connaît des réalités spécifiques. Le one size fits all n’existe pas. Un actionnariat à long terme, par exemple, signifie aussi moins de liquidités, il faut en tenir compte. Quoi qu’il en soit, tout actionnaire doit se comporter en caméléon et s’adapter au schéma de gouvernance choisi dès le début, tout en étant au fait des enjeux de l’entreprise », mentionne encore Lutgart Van den Berghe.
Le Plan d’Action conçu pour le Centre Shareholder Governance sera inspiré à la fois par les développements européens et internationaux, ainsi que par les questions issues du contexte belge. Pour Hnia Ben Salah, Senior Research Associate chez Guberna, le premier rôle du centre sera d’ouvrir le débat et stimuler la réflexion. « Nous ne voulons pas venir avec des affirmations toutes faites. Le questionnement est parfois déjà une réponse en soi. C’est aussi un des rôles de Guberna ». Sensibilisation, partage de bonnes pratiques et analyses sur le terrain seront au programme. « Nous commençons avec beaucoup de questions, conclut Lutgart Van den Berghe. Nous avancerons étape par étape ».