« Les professionnels de l’audit sont là pour fortifier les digues »
Secteur assez vaste, l’audit peut se diviser en trois grands volets: les auditeurs internes, les réviseurs d’entreprises et les comités d’audit. Intégrer leurs différentes approches doperait l’efficacité et la réactivité du secteur dans son ensemble. Chacun bénéficierait ainsi des analyses des autres. « Chaque profession a tout à gagner en resserrant la collaboration avec les autres. Il y a de nombreuses synergies à créer dans l’idée d’amener davantage de transparence », explique Jean-Michel Cassiers, Président de IIA Belgique. « C’est d’autant plus important dans le secteur public et le non marchand, appuie Daniel Kroes, Président de l’IBR. La Belgique a pris quelques mesures pour renforcer la surveillance des différents niveaux de pouvoir, mais elles restent, pour la plupart, internes. S’il y a une seule leçon à tirer de la crise, c’est bien l’importance cruciale de l’amélioration continue pour les acteurs du public. Il faut faire plus avec moins et donc travailler mieux ».
Pour Patricia Leleu, Membre du conseil de l’IRE et co-présidente de la journée d’étude, instaurer des audits de performance, jusqu’à présent peu répandus dans le public, dans toutes les entités est plus que jamais d’actualité. « Il faut rappeler que le degré de risque 0 n’existe pas, mais les professionnels de l’audit sont là pour fortifier les digues, partage-t-elle. La complexité de l’environnement auquel la plupart des organisations sont confrontées ne peut être prise à la légère. Le contrôle des activités doit aussi passer par une analyse de la performance ».
Panorama légal
Si les missions et les responsabilités des acteurs de l’audit s’ancrent dans des cadres légaux différents, ils ont tout intérêt à ne pas s’arrêter aux frontières strictes de leur profession pour mettre en place une approche intégrée du contrôle et adopter un regard transdisciplinaire.
Dans le secteur privé, le recours aux différentes formes d’audit est déjà depuis longtemps entré dans les mœurs. La loi du 17 décembre 2008 a imposé la constitution d’un comité d’audit dans les sociétés cotées, ainsi que dans certaines institutions financières, définissant de facto des relations avec l’audit interne et externe. Le Code belge de gouvernance d’entreprise (2009) fournit des directives concernant les tâches du comité d’audit, tandis que le Code Buysse II constitue le cadre de référence pour les sociétés non cotées.
Du côté du secteur public, la maturité varie selon les niveaux de pouvoir. Il n’y a pas encore de communauté de pratiques en tant que telle, ni de vision globale. « C’est un processus évolutif, soutient Daniel Kroes. La surveillance de la Cour des comptes ne suffit plus. Ce qui est important à souligner, c’est la logique de progrès qui se met en place en ce moment, même s’il reste beaucoup de chemin à parcourir. Améliorer le contrôle des entités publiques, c’est aussi améliorer la démocratie ».
La région flamande se veut pionnière en la matière. Son « décret des comptes » datant du 08 juillet 2011a fait collaborer l’administration régionale, la Cour des comptes, l’audit interne, l’inspection des finances et l’IRE suivant une approche intégrée. Le 5 juillet dernier, le Gouvernement flamand a également ratifié le « décret d’audit » pour les pouvoirs locaux.
Et Jean-Michel Cassiers d’ajouter :« C’est une pratique que l’on retrouve également à d’autres niveaux de pouvoir comme à la Fédération Wallonie-Bruxelles où une collaboration s’est instaurée entre l’audit interne et la Cour des comptes et où le partage d’informations est prévu via le comité d’audit auquel la Cour assiste à titre d’observateur ». A l’échelle fédérale, c’est le Comité d’audit de l’administration fédérale qui encadre les systèmes de contrôle internes.
« La transposition de la directive européenne du 8 novembre 2011 sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des Etats membres (2011/85/UE), fixée au 31 décembre 2013, renforcera assurément le rôle des acteurs de l’audit et offrira une plus grande transparence financière dans le secteur public, dès 2014, prévoit Daniel Kroes. La crise de 2008 constitue un échec politique, elle a révélé un manque de contrôle et des failles dans l’analyse des finances de l’Etat. Les pouvoirs publics sont en train de tirer des leçons du passé ».