La CJUE condamne le régime de précompte mobilier belge applicable aux sociétés d’investissement étrangères

Le 25 octobre dernier, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a jugé que le régime belge de précompte mobilier sur les revenus payés à des sociétés d’investissement étrangères ne disposant pas d’un établissement stable en Belgique comme étant incompatible avec les libertés d’établissement et de circulation des capitaux.

Selon la législation fiscale belge (art. 185 bis CIR92), les sociétés belges d’investissement jouissent d’un régime de taxation exorbitant du droit commun. En d’autres termes, ces sociétés ne sont taxées que de façon très limitée en Belgique (avantages anormaux ou bénévoles reçus et dépenses non admises), de sorte qu’en pratique leur base imposable est infirme comparée à celle qui aurait été obtenue par application du régime de droit commun. En outre, elles peuvent récupérer le précompte mobilier qui aurait été prélevé sur les intérêts et dividendes qu’elles ont perçus.

Dans le chef de société d’investissement étrangères ne disposant pas d’un établissement stable en Belgique, une telle récupération n’est pas possible, de sorte que le précompte mobilier belge retenu à la source sur les intérêts et dividendes payés à une société d’investissement étrangère constituent un impôt définitif.

Le jugement C-378/11

Le 3 juin 2010, la Commission Européenne a formellement demandé à la Belgique de modifier sa législation afin de résoudre cette situation discriminatoire évidente. En raison de l’inaction du législateur belge, la Commission Européenne a saisi la CJUE. Cette dernière, par le jugement en question, a donné raison à la Commission Européenne en ce sens que ce régime est discriminatoire et restreint la liberté de circulation des capitaux ainsi que la liberté d’établissement.

Ce jugement s’inscrit dans un courant de décisions similaires rendues par CJUE et ayant condamné plusieurs états membres à autoriser la récupération des retenues à la source indûment prélevées. A date, il existe de réelles opportunités de récupération dans plus de 10 états membres. Les modalités (procédure, délai de prescription,…) varient évidemment au cas-par-cas.

Conséquences pratiques

Sur cette base, les sociétés européennes d’investissement ayant reçu des intérêts et dividendes soumis à un précompte mobilier belge peuvent en réclamer le remboursement. Il en va de même pour les fonds de pension se trouvant en pareille situation.

Les contribuables désireux de récupérer ce précompte mobilier indument prélevé devront soit procéder à une demande de dégrèvement d’office, soit introduire une réclamation (pour autant que les conditions requises soient remplies).
Ce jugement, s’il est certes positif pour les sociétés d’investissement étrangères, contribuera toutefois à créer un déficit budgétaire qu’il faudra combler… grâce à de nouvelles mesures, et l’expérience actuelle montre que ce n’est pas chose aisée!

Geoffroy Galéa et Stéphane Jourdain (Deloitte)